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LA MORALE ET LA PEDAGOGIE DE M. BARRES 62 I

depuis le péché, elle ne peut s'empêcher d'avoir des complaisances. Le " moi " c'est l'ensemble de sentiments et de goûts particuliers qui résultent, en chacun de nous, du tempérament, de l'éducation, de l'hérédité. Le moi, au sens où Barrés le prend, est de l'ordre des corps : ce n'est pas devant cet ordre que Pascal humilie l'ordre de l'esprit, mais seulement devant l'ordre infiniment supérieur de la charité. Et si Pascal reconnaît comme Barres les " fatalités " qui pèsent sur la raison humaine, il

I" n'accepte " ni " n'aime " comme lui, ces " fata- lités qui le bornent". Il n'admet pas plus la subordination de la raison au corps individuel qu'au corps social. C'est, au contraire, sur l'inquié- tude spirituelle de l'homme qu'il compte pour l'amener à renoncer au moi, à mourir à son corps et à sa patrie terrestre. " Car toute la dignité de l'homme consiste en la pensée ".

Pascal humilie notre raison imbécile, et abaisse ceux qui s'élèvent. Mais cet abaissement n'est pas pour lui la solution du problème : et il élève ceux qui s'abaissent. Ce n'est pas une résignation amoureuse qui le saisit, mais l'indignation au contraire, quand il s'aperçoit que cette pensée qui fait l'orgueil de l'homme est enchaînée par les " coutumes " traditionnelles, et les misères orga- niques. C'est en se déracinant, en s'arrachant à la terre, à l'amour propre, que l'homme peut espérer de faire son salut. Seulement, (et c'est ici qu'inter-

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