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FERMINA MARQUEZ 77 j

sortir de son collège où la vie était frugale et rude, oui, ne serait-il pas heureux, ici ? On lui donnerait la chambre feuille-morte, qui est encore plus riche que celle-ci, et il irait faire ses courses dans la Victoria. Oh ! que cela soit possible !

Elle abaissait ses regards sur sa gorge nue ; elle se con- templait allongée dans sa robe splendide ; elle admirait la petitesse de ses pieds cambrés. N'est-elle pas, elle aussi, digne du roi de son cœur ? — Les heures de la nuit ont un aspect romanesque. Deux Heures de l'après-midi est prosaïque, presque vulgaire ; mais Deux Heures du Matin est un aventurier qui s'enfonce dans l'inconnu. Et cet inconnu, c'est Trois Heures du Matin, le Pôle nocturne, le Continent Mystérieux du temps. On en fait le tour ; et si on croit l'avoir traversé jamais, on se trompe, car bientôt Quatre Heures du Matin arrive sans que vous ayez surpris le secret de la nuit. Et le petit jour strie déjà les volets de ses baguettes bleues parallèles.

Maintenant, lorsque Fermina Marquez paraissait sur le perron du parloir, à Saint- Augustin, il y avait à peine deux heures qu'elle était levée, et ses beaux yeux battus se fermaient à l'éclat trop vif du soleil. Mais sa démarche était plus noble, plus triomphale que jamais. Elle se montrait avant que les élèves eussent quitté le réfectoire, tout exprès pour agacer Santos, qui, ayant dé jeûné en grande hâte, et étant obligé de rester à son banc, trépignait d'impatience, prêt à bondir dehors, aussitôt les grâces dites.

Comme il nous paraissait heureux ! Nous savions qu'il portait, enroulé à son poignet droit et dissimulé sous sa

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