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782 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

eux, j'ai des nouvelles des autres. Beaucoup sont morts, Monsieur, beaucoup sont morts. Voyez-vous, y en avait qui étaient trop riches ; c'est ce qui les a perdus. A peine lâchés, ils se sont mis à faire la noce. Ils étaient trop bons, on les a entraînés. Ces sales femmes sont capables de tout. Du reste, on n'a qu'à voir d'où elles sortent ; allez, on a beau faire, la caque sent toujours le hareng. Les uns ont tout perdu au jeu, ou à la Bourse, et se sont tués ; les autres sont morts de noce, tout simplement. Que voulez-vous ? Ma foi, tant pis pour eux : comme on fait son lit on se couche. Ce qui est triste, c'est la mort de ce pauvre petit jeune homme, si intelligent, Léniot, Léniot (Joanny). Vous ne l'avez pas apprise ? C'est son pauvre père qui me l'a annoncée, à cette place même, en pleurant. Voilà : il est mort à la caserne, pendant une épidémie, quatre mois après son incorporation. Ces garnisons de l'Est sont dures pour les recrues, surtout les casemates. Enfin il est mort. Un garçon qui était si bien parti. Il paraît qu'avant ses vingt-et-un ans il avait déjà gagné deux diplômes de licence, et un prix de la Faculté de Droit de Paris.

M D'Amérique aussi, il m'en vient quelquefois. Ils viennent passer un an chez nous et en Europe. Ainsi M. Marti junior est à Paris en ce moment. Il est venu me voir il y a quinze ou dix-huit jours. M. Montemayor, de Valparaiso, je l'ai vu lui aussi ; il y a de cela un an à peu près. Il avait amené un de ses frères que je ne connais- sais pas, qui n'a pas été élevé ici... C'est curieux ces Américains : de deux frères (c'est une observation que j'ai souvent faite), de deux frères l'aîné est toujours le plus — comment dirai-je ? — le plus Européen : il a le

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