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NOTES ynç

ambition qui le mène, comme don Juan ? Faut-il voir en lui l'émule des négateurs romantiques, des Lucifer et des Caïn ? Avec plus d'élégance, d'humour et de virtuosité lui trouverait- on enfin quelque air de ressemblance avec les pathétiques démoralisateurs qu'Oscar Wilde a placés dans ses comédies ?... Je crois que tous ces souvenirs littéraires se sont mêlés dans l'esprit de M. Fleg et qu'il en a subi l'attrait sans scruter leur essence. Il a jugé faussement une grande figure dramatique. Il n'a même pas senti ce que pouvait avoir de hautement, de noblement pathétique la passion du risque, le goût de la con- fidence et celui du partage. Entre ses mains le magnanime Candaule devient un stérile maniaque, un neurasthénique spécial.

Telle quelle, la pièce n'a point rencontré l'assentiment du public. Elle a soulevé de dégoût les âmes bourgeoises de la rue du Sentier. C'est un phénomène assez curieux. Car ces mêmes âmes se dilatent aux obscénités du vaudeville. Elles y trouvent une gaîté saine, réputée " bien française ".L'ouvrage de M. Fleg leur a paru morbide, contrefait, inadmissible. Et je pensais, en écoutant les murmures des spectateurs, qu'ils eussent cependant toléré le même degré d'immoralité dans une situation motivée par d'humbles et sournoises fatalités extérieures ou intimes. Le théâtre libre a rendu vraisemblables maintes bassesses de cœur et vilenies de caractère. Mais il présentait le vice comme une faiblesse, l'inclination au mal comme une diminution de la spontanéité humaine, comme une abdication des instincts généreux sous l'empire de la crainte, du désir, ou de l'intérêt. Les plus abjects réflexes se font excuser. Ce que le public réprouve, ce qu'il a condamné dans la Bête, comme un attentat à sa dignité, c'est l'orientation insolite d'une volonté libre.

J. C.

��UN POEME DRAMATIQUE DE M.HENRY BATAILLE.

J'aime le courage et la coquetterie de M. Bataille, qui loin de renier un passé poétique qui nous est cher, s'avisa de

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