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ISABELLE 45

— Je vous avoue, Monsieur l'abbé, que je croule de sommeil.

Dès qu'il m'eut quitté, je relevai les bûches du foyer, j'ouvris la fenêtre toute grande, repoussant les volets de bois. Un grand souffle obscur et mouillé vint incliner la flamme de ma bougie, que j'éteignis pour contempler la nuit. Ma chambre ouvrait sur le parc, mais non sur le devant de la maison, ainsi que celles du grand couloir qui devaient sans doute jouir d'une vue plus étendue ; mon regard était aussitôt arrêté par des arbres ; au dessus d'eux, à peine restait-il la place d'un peu de ciel où le croissant venait d'apparaître, recouvert par les nuages presque aussitôt. Il avait plu de nouveau ; les branches larmoyaient encore...

— Voici qui n'invite guère à la fête, pensai-je, en refermant fenêtre et volets. Cette minute de contempla- tion m'avait transi, et l'âme encore plus que la chair ; je rabattis les bûches, ranimai le feu, et fus heureux de trouver dans mon lit une cruche d'eau chaude, que sans doute l'attentionnée Mademoiselle Verdure y avait glissée.

Au bout d'un instant je m'avisai que j'avais oublié de mettre à la porte mes chaussures. Je me relevai et sortis un instant sur le couloir ; à l'autre extrémité de la maison, je vis passer Mademoiselle Verdure. Sa chambre était au dessus de la mienne, comme me l'indiqua son pas lourd qui, peu de temps après, commença d'ébranler le plafond. Plus il se fit un grand silence et tandis que je plongeais dans le sommeil, la maison leva l'ancre pour la traversée de la nuit.

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