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NOTES 899

aujourd'hui de " composer un chef-d'œuvre théâtral en alexan- drins réguliers. "

Préconisant la Réforme technique du théâtre en vers, M. Jules Romains poursuit en ces termes :

" Je prétends que l'alexandrin, même dans sa fraîcheur, n'était pas le vers dramatique que réclamait notre langue. Cor- neille et Racine on écrit leurs chefs-d'œuvre plutôt malgré lui qu'avec lui.

Notre vers de douze syllabes est un vers tour à tour épique et lyrique. Il n'a sa place, dans un drame, qu'aux moments où l'action est " en palier " ; qu'aux moments où l'inspiration s'étale et s'élargit pour un chant de passion ou de gloire. II ne doit point constituer la trame continue de l'œuvre. "

Quel sera donc notre vers dramatique ?

" La littérature dramatique de notre moyen âge a failli créer et fixer le vers de théâtre. Qu'on se reporte aux mystères, et en particulier à la Passion de Gréban. Le vers de huit syllabes donne au dialogue de Gréban une vie, une prestesse, une mo- bilité, et, quand il le faut, une âpreté autoritaire, que Corneille obtiendra, avec peine et par instants, de l'alexandrin. L'em- phase que l'on reproche à Corneille, et qui boursoufle trop de fois la ligne de son discours, me paraît due autant à la structure même de l'alexandrin français qu'à l'amour de Corneille pour les sonorités oratoires.

Pour nous comme pour Gréban le vers de huit syllabes sera le rythme fondamental... "

Mais d'autres nombres seront admis, car :

" ...Le vers de neuf syllabes se prête remarquablement à l'expression du trouble, de l'incertitude, de l'instabilité; il a sa place encore dans les transitions, dans les tournants du dialogue.

Le vers de dix syllabes, césure au milieu, a une vertu pathé- tique. Il sied aux cris de langueur, de passion, de désespoir.

Les vers de sept syllabes, celui de cinq syllabes sont requis par certains moments de tension extrême. Ils peuvent paraître, au cours d'un dialogue en octosyllabes, pour signifier le paro- xysme de la lutte, le corps-à-corps de deux volontés.

A l'alexandrin seront dévolues les affirmations solennelles,

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