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PAYSAGES DE LA TRENTIEME ANNÉE 351

ne faisait pas exactement partie de notre planète, que surtout il était hors du temps, avec d'autres conditions d'être, quelque chose d'affreusement détaché, de libre. Dans ma pensée naïve un rap- port s'établit entre la terre d'Islande et le mot " irrémédiable. " " Pays pauvre, stérile et qui se dépeuple de plus en plus " disait mon guide.

��II

��Qui n'a goûté, voyageant en mer, le voisinage familier des lointains dans le hublot, le compa- gnonnage du mouvant infini, dont l'absence est si déconcertante, les matins de réveil dans les ports ? Combien cette côte islandaise, vue de près, était sérieuse. Ici rien ne prêtait au rêve. J'aUai à terre de bonne heure, je pris un de ces poneys qui seuls là-bas, servent au voyage, et m'aventurai dans la campagne.

Les maigres cultures de pommes de terre ces- sent à moins d'un kilomètre de la ville. Je passai sur de grandes étendues de lave et de silex, je dus traverser à gué un noir torrent transparent. Le cheval s'arrêta au milieu de l'eau qui lui venait au poitrail. Du sabot, il en éprouvait la profondeur, humant avec inquiétude. La solitude montait en moi comme la marée sur un îlot. Je pouvais me croire seul dans toute l'Islande, seul dans tout l'océan arctique. Au delà du torrent, le sol peu à

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