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LA FÊTE ARABE 4^1

errante ? S'était-elle arrêtée dans ces affreux villages ? ou bien s'en était-elle allée porter ses campements ailleurs, loin de nos routes, à l'abri de nos yeux r

Penché à la portière, je guettais le moment oii j'allais enfin découvrir l'immense horizon des dunes et les ver- dures de l'oasis, telles qu'elles m'étaient apparues un matin avec leurs reflets bleus de paon sur des terrains couleur d'aurore. Mais la voie ferrée ne suivait plus le chemin abrupt et pittoresque que prenait autrefois la diligence. Au lieu de gravir la falaise qui borne la plaine saharienne, elle longeait le lit desséché d'un oued, et c'est à plat qu'on abordait le désert, sans même s'en être aperçu.

J'étais encore sous le coup de cette impression désen- chantée, quand une dizaine d'Arabes en gilets et en tricots, avec des pantalons à carreaux, des plaques de cuivre sur le bras, s'emparèrent de mon bagage comme s'ils m'avaient dévalisé. Avant même que je fusse revenu de ma sur- prise, je les vis s'élancer au galop dans une large avenue bordée de maigres peupliers et de trottoirs en macadam. Un sirocco brûlant faisait tourbillonner sur la chaussée des colonnes de poussière. A droite et à gauche, des cochons noirs grouillaient au milieu des ordures, des ferrailles et des pots cassés qui couvraient des terrains vagues, d'où m'arrivait par bouffées l'ignoble odeur des bêtes, des détritus et des fanges remuées. Des restes de cuisine, qui fermentaient dans des baquets par quarante degrés à l*ombre, jetaient là une note aiguë qui tenait de la vase et de la moisissure. Les bêtes excitées par cet afïreux breuvage s'agitaient tout autour et se livraient bataille avec des grognements et des cris. De loin j'apercevais les toits rouges d'une sorte de faubourg, qui s'étendait dans

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