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��LES ROMANS

Lettre a M, Jacques Copeau

Mon cher Confrère,

Je ne me plaindrai pas de vous. Vous reconnaissez vous- même que, dans votre étude sur deux de mes romans, L'Invasion et Mademoiselle de Jessincourt, vous avez été " injuste " pour moi. Et c'est l'être, en effet, que de juger, seulement sur deux de ses livres, l'auteur d'une douzaine de volumes, — critique, voyages ou romans, — lesquels sont d'une tout autre couleur. C'est l'être davantage que de ne pas vouloir se placer à son point de vue et de le condamner au nom d'une esthétique qui n'est pas la sienne.

Mais j'aurais mauvaise grâce à contester vos critiques. Si je réponds à votre article, c'est que vous y avez soulevé une question générale, qui intéresse tous les romanciers. Plus vous avez mis de talent à exposer votre doctrine, — une certaine doctrine d'art, — plus je me sens obligé à en défendre une autre, qui n'est pas seulement la mienne, mais celle des maîtres du roman français.

��Au fond, le débat est entre la méthode intellectuelle et la méthode sentimentale. Vous me paraissez très bergsonien, moi je reste fidèle à notre vieille tradition intellectualiste.

Il est entendu que la matière commune de notre art, c'est la réalité. Vous dites, en citant Montaigne, qu'il la faut "espouser ". Moi je dis qu'il faut la " représenter ". Vous procédez par le dedans, moi je procède à la fois par le dedans et par le dehors.

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