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DE LA FOI 997

sorte de lenteur sous-marine, pareille au sable invisible qui retient le sol des voiles.

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��Pourtant me serais-je aperçu de cette entrave s'il n'y avait en moi quelque chose d'entravé par elle, quelque timide velléité qu'elle gène ?

Non seulement mon esprit, en effet, mais aussi faiblement mon cœur tendent vers la foi. O frêle et étrange désir qui en moi n'es pas de moi ! Sur toute mon âme, et quoi qu'elle puisse méditer ou tenter, légèrement plane une sorte de souhait théorique, la volonté abstraite de devenir différent. Non, ce n'est pas moi qui forme un tel vœu. Et quel vœu formerais-je contre mon plaisir ? Il semble que quelqu'un prenne l'initiative de ce désir, le mette en moi et patiemment attende que j'arrive à le ressentir. Je reconnais qu'il n'est pas mien à ce qu'il ne change jamais. Je l'oublie, mais je le retrouve ensuite pareil. Rien de ce qui m'arrive, en le secouant, ne réussit à le transfor- mer. Ni il ne croît, ni il ne diminue avec mes autres sentiments. Il n'est pas nourri de la sub- stance de mon âme. Mais il s'obstine, il dure sur moi ; peut-être même, — je ne sais pas encore — augmente-t-il imperceptiblement, avec une régula- rité infinitésimale, comme ces mouvements cos- miques, qui ont si bien le temps. Est-ce la grâce ^

Jacques Rivière.

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