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I006 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

il n'aura à peindre que pour lui-même. Mais il peindra.

Là-haut, près de son Dieu, ne croyez pas pour- tant qu'il crée dans une sorte d'abstrait, même divin, qu'il use et dessèche son âme à la poursuite d'un problème de proportions. Vous n'avez pas tout pénétré. Il vous faut faire un pas de plus dans l'approfondissement du mystère. Il a sa source dans le concret, dans l'humain.

Chaque pierre du monument a la forme d'un être, est proprement un être, et notre frère à tous en douleur et en passion. Non, il ne choisira ni son point d'appui, ni son geste, dans un autre dessein que celui de ï expression. Il se moque bien de l'architecture ! Il vit une certaine vie et il ne songe qu'à la vivre. Il est acteur d'un drame. Il jouera vrai d'abord. Que vous y consentiez ou non, ici la littérature entre en jeu, ou si vous préférez la poésie. Giotto réclame le droit de penser, de conter, de chanter, et au même titre que Dante. Riez : il lui faut un sujet. — Et, le sujet donné, il refuse de le traiter comme un prétexte, de le ployer à une forme préconçue, de l'introduire dans un ordre déjà fixé. Le sujet dicte l'ordre, crée la forme, fixe l'harmonie : à la mesure même de sa puissance d'émotion. Sur son chemin de vérité, il doit trouver son juste équivalent plas- tique, qui sera forcément " logique ", qui sera

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