NOTES 189
Quand vous m'avez ému et bouleversé par quelque chose d'humain, ce fut sans le vouloir, et parce que la vie, votre vie, devançait votre assentimeirf et se faisait pathétique sans votre aveu. Vous avez été une fois tragique, et m'avez fait peur ; mais ce fut votre faillite — et ce n'était pas dans vos intentions.
Salomé est une œuvre parfaitement réussie ; un jeu (a play). Voici des marionnettes : Salomé, curieuse, têtue et méchante (Vicieuse ? une poupée qui serait vicieuse ? cela serait " tout à fait ridicule", n'est-ce pas ?), Hérode, l'ogre jouisseur et peureux. M. de Max y fut irréprochable. M™^ Ida Rubinstein ne lasse pas notre admiration par l'intelligence et l'harmonie de son geste. Certains cris peut-être sont d'une passion trop vraie, trop sincère, qui fait songer à Phèdre alors qu'une réminiscence de Petrouchka n'eût pas été déplacée...
Chaque instant défend d'oublier que nous sommes au spec- tacle : ces images qui ne naissent que par trois... ces allitérations... Le poème élude ce qui serrerait de trop près la passion, et pourrait donner de l'angoisse. Il glisse autour du fait drama- tique : on voit un poisson diapré contourner une épave triste... Comme il évite bien le conflit qui est en Hérodias, et dont un dramaturge se fût hâté de faire sa proie !
Au milieu de l'action, une alerte : un jeune capitaine, qui n'a rien compris à la pièce, se tue d'amour pour Salomé. On fait disparaître ce mauvais joueur. Le jeu, il est vrai, finit mal : Hérode prend peur et la mort de Salomé donne, dans sa sobriété, la note dramatique. Ne comptons pas à ce titre la décollation d'un prophète bavard et manifestement antipathique. D'ailleurs Salomé le fait tuer comme d'autres enfileraient des mouches vivantes sur une épingle. Ne soyons pas comme ces Juifs qui prennent toute dispute au sérieux ou comme les Stoïciens qui se tuent par vertu. Ils sont " tout à fait ridicules. "
Je songe à d'Annunzio qui ne cherche non plus à maîtriser
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