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532 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

celle-ci des vices . latents, des germes de décomposition. Ou plutôt M, Raphaël Cor fait semblant de le croire. La vérité est qu'il est animé d'hostilité non pas seulement contre les snobs, mais contre toute une famille d'oeuvres d'art qui sont précisé- ment celles où toute une génération a trouvé ce qui répondait à son attente et autour de quoi elle s'est groupée. Il n'aime guère Monet, ni Maurice Denis, ni Laforgue ; il n'aime ni Jammes, ni Debussy. Les arguments qu'il leur oppose étonnent chez un homme qui a grandi sous le règne, si l'on peut dire, de ces poètes. M. Cor a écrit un livre sur Anatole France, ou plutôt en l'honneur d'Anatole France. Et ceci aussi le caractérise. Ses idées et ses goûts sont de la descendance de ceux qu'on trouve dans la Fie littéraire. Et précisément parce que l'état d'esprit, l'orientation critique de l'auteur du Jardin d^Epicure a peu de défenseurs dans la jeunesse d'aujourd'hui, il est intéres- sant de leur découvrir un champion qui, jeune et avec des arguments d'apparence renouvelée, rouvre certains procès qui semblaient gagnés définitivement.

Balbutiement, faiblesse, sénilité, charme morbide et dégénéré, tout ce que M. Raphaël Cor reproche à Debussy, n'est-ce pas ce qu'on a de tout temps reproché à toute musique nouvelle ? Il faudrait relever les critiques que Rousseau formulait contre Rameau ; il faudrait y comparer celles dont Nietzsche croyait écraser Wagner. On serait étonné de rencontrer les arguments qui resservent aujourd'hui. Pourquoi faut-il qu'à côté d'un sens vigoureux de ce qui est sain et puissant, à côté d'une juste antipathie pour l'art ingénieux et fignolé, M. Raphaël Cor accuse des goûts aussi intransigeants ? On éprouve de la sympathie pour presque tous ses principes et de l'hostilité pour presque tous ses goûts. Avec un peu d'ingéniosité nous pourrions nous aider des premiers pour combattre les seconds, et pour défendre ce que nous admirons nous-mêmes. Voilà neuf ans que nous connaissons Pelléas, que nous l'entendons presque chaque année avec une joie nouvelle ; si le parfum en est

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