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LA MERE 641

de l'air. Et, là-haut, c'était le passage des grands oiseaux migrateurs qui hantent les îles de la Sonde. Avec une longue-vue on pouvait les voir venir et se poser : de grands oiseaux bleus portant au sommet de la tête des lambeaux couleur de chair. Au soir, des bandes de rous- settes s'abattaient ; elles siégeaient, et l'on eût dit qu'elles avaient apporté sous leurs ailes l'obscurité tombante parmi laquelle elles les agitaient. Et, sans trêve, les cigales chantaient dans le jardin torride et nébuleux.

Mrs. Almeida et Van Leer s'en furent visiter les bêtes. Outre l'horticulture, Almeida faisait commerce de fauves avec les jardins zoologiques d'Europe. Il en tenait toujours en cage non loin de ce fourré dont le voisinage leur convenait. C'était des singes, des coatis, des serpents et autres monstres dont Mrs. Almeida, avec grand renfort de simagrées féminines, de cris et de câlineries, fît les honneurs à Van Leer. Elle ne paraissait point établir de distinction entre un porc-épic et un perroquet, ces deux bêtes, avec tout ce qui se trouvait ici dans les cages ou les caisses, se confondant pour elle sous la dénomination unique de " vermine abominable. " Pas même le serpent, dont elle aurait dû garder au moins une vague représentation, ne s'offrait à son imagination comme une bête différente des autres. En passant, elle lui décocha, comme aux autres, un léger coup dans la cage, et le provoqua avec un petit cri guerrier, tout en le traitant de " vermine abominable. " Après quoi elle fit des caresses à un aimable singe, derrière le treillage de sa caisse, et l'aimable singe l'ayant égratignée et mordue, elle émit un glapissement et, dans son indignation, rangea l'animal parmi les autres vermines. Almeida venait d'acquérir un crocodile, long

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