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62 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

XVIII

Mon Enfant chérie,

Vous me disiez dans votre dernière lettre avoir été souffrante ? Etes-vous remise ? Cette lettre m'a apporté une grande joie. Je suis plus fort : les médecins disent que ce que j'ai est très-peu de chose, mais je ne puis les croire tant que mon oppression et l'étroitesse de ma poitrine subsistent. Je ne veux pas me laisser aller et m'attendrir en me plaignant de notre longue séparation. Dieu seul sait s'il me sera donné de goûter le bonheur avec vous ; mais je sais bien par moi-même que ce n'est pas un médiocre bonheur de vous avoir tout au moins aimée comme je l'ai fait jusqu'à présent — si cela doit en rester là, je ne serai pas ingrat — et si je dois me remettre, le jour de ma guérison me verra à votre côté dont rien ne pourra plus m'éloigner. Tant que je serai bien, vous serez le seul remède qui puissiez faire que je le demeure. Je vous écris peut-être — sûrement hélas ! — dans un état d'esprit trop déprimé ; demandez à votre Mère qu'elle vienne me voir ; elle vous rapportera un compte-rendu meilleur que le mien.

Votre toujours affectionné

John Keats.

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