NOTES 733
remplacé par une quatrième tragédie, d'un caractère plus léger et d'un dénouement plus plaisant, comme VAlceste d'Euripide. De ce genre si fécond et si curieux, à la fois noble et bouffon, intermédiaire entre la tragédie et la comédie, il ne subsistait jusqu'à présent qu'un seul spécimen, le Cyclope d'Euripide. "
Sans doute eût-il été plus émouvant encore de découvrir un autre Œdipe Roi, mais félicitons-nous de la trouvaille. Ces frag- ments sont d'une fantaisie enjouée et charmante. Ils révèlent chez Sophocle cette gaieté secrète, ce sourire qui fait la force cachée de l'auteur tragique. Il nous fallait ces Traqueurs, comme il nous faut pour Corneille Le Menteur ou Don Sanche, comme il nous faut pour Racine les Plaideurs. Ecoutez cette entrée de la nymphe Kyllène apostrophant les satj-res qui, sous prétexte de retrouver les bœufs volés, se livrent devant sa porte à des danses, des ruades et un formidable vacarme :
" Kylène. — Brutes ! Pourquoi vous êtes-vous rués, avec tant de tumulte, sur ce verdoyant sommet, plein de bois et de gibier ? Quel est ce manège ? Pour quel métier avez-vous quitté le service qui naguère vous attachait à votre maître, lorsque, vêtu d'une peau de faon et portant dans la main un thyrse délicat, il suivait, en criant " évohé ", le cortège du dieu, avec ses filles, les nymphes, et avec l'essaim de ses fils ? Maintenant je ne com- prends rien à votre conduite, je ne sais où vous entraîne le tour- billon d'une frénésie nouvelle. Tout m'étonne. Presque à la fois, j'ai entendu un appel, comme si des chasseurs cernaient les petits d'une bête prise au gîte, et je ne sais quels propos mordants au sujet d'un voleur et d'un vol ; puis l'annonce d'une récompense ; et tout de suite une rumeur confuse, s' approchant de mon logis avec un bruit de ruades. En toute autre occasion, ce mélange de clameurs insensées m'aurait fait croire que vous avez l'esprit malade. Quel est votre dessein sur une nymphe innocente ? "
Admirable mélange de lyrisme et de fantaisie ! Un pas- sage entre tous est beau, celui qui montre l'épouvante et l'extase des satj'res la première fois qu'ils entendent les accords
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