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NOTES 94 t

d'un sens à un ensemble de faits, l'instinct. Quelle est, parmi ces diverses " intuitions ", celle qui répond vraiment à cette méthode que M. Bergson annonce et qui veut différer de l'in- telligence et connaître du mouvement ? Ce ne sont pas les premières, qui sont éminemment intellectuelles : il faut donc conclure que " l'intuition " bergsonienne n'est pas autre chose que rinsttnct. Mais laissons là la nature de la méthode et voyons celle-ci dans ses principaux résultats : la perception du moi dans sa mobilité (ou " durée ") et la signification de l'évolution. Or, i" percevoir le moi en tant que force est la perception la plus banale ; 2" le percevoir en tant que continuité est une pure impossibilité, le changement infinitésimal étant le parangon de Vétre de raison. D'autre part, s'agissant de l'évolution, M. Bergson se borne ou à affirmer qu'elle est un acte, et à épuiser le contenu logique de l'idée ^acte en tant qu'elle s'oppose à l'idée de chose^ ou à prendre un état de la vie, puis un autre état, et, sous le nom de progrès, de caractériser, tout comme spencer, la différence de ces deux états.

Je ne défendrai pas la métaphysique de M. Bergson contre la rude et puissante attaque de M. Benda, dont le petit livre, d'une admirable beauté linéaire, résume un grand effort d'idées précises et de définitions claires. Dans ses affirmations, dans sa partie positive et constructive, la philosophie bergsonienne m'a toujours paru monotone et fuyante. D'autre part, je n'ai jamais cru à l'intuition en tant que faculté mystérieuse et inanalysable, je veux dire en tant qu'elle se distingue ou des diverses " intui- tions " que j'ai déjà énumérées plus haut, ou de la perception ordinaire du moi, ou d'une aperception soudaine de rapports, ou du bouillonnement des idées (dionysiasme), ou de l'émotion philosophique, ou de la croyance, etc., etc. C'a même tou- jours été une de mes grandes stupéfactions que M. Bergson fût par excellence un tempérament antivisionnaire.

Mais j'avoue que les facultés critiques et destructives de cet esprit, sa puissance dissolvante, m'ont toujours frappé d'étonne-

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