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Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/10

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quand j’étais photographe

gnation le savant « instituteur » refusa de se prêter une seconde de plus à cette « supercherie de ventriloque », et de quel fracas il sortit, jurant que l’impertinent mystificateur aurait affaire à lui…

« — Comment ! » me disait un jour, à sa mauvaise heure, Gustave Doré, — un esprit clair et dégagé pourtant s’il en fut ! — « comment, tu ne comprends pas la jouissance qu’on a à découvrir le défaut de la cuirasse dans un chef-d’œuvre ? »

L’inconnu nous frappe de vertige, et nous choquerait comme une insolence, ainsi que le « Sublime nous fait toujours l’effet d’une émeute » [1].

L’apparition du Daguerréotype — qui plus légitimement devait s’appeler Niepcetype — ne pouvait donc manquer de déterminer une émotion considérable. Éclatant à l’imprévu, au maximum de l’imprévu, en dehors de tout ce qui pouvait s’attendre, déroutant tout ce qu’on croyait connaître et même le supposable, la nouvelle découverte se présentait assurément, comme elle reste, la plus extraordinaire dans la pléiade des inventions qui font déjà de notre siècle interminé le plus grand des siècles scientifiques, — à défaut d’autres vertus.

Telle y apparaît en effet la glorieuse hâte que le foisonnement des éclosions semble se passer même de l’incubation : l’hypothèse sort du cerveau humain tout armée, formulée, et l’induction première

  1. Ch. Baudelaire. Curiosités esthétiques.