Aller au contenu

Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/12

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
4
quand j’étais photographe

des Chappe, des Conté, de tous, — si loin que, sur cet ensemble des manifestations, des explosions presque simultanées de la Science en notre dix-neuvième siècle, sa symbolique devra, elle aussi, se transformer : — « l’Hercule antique était un homme dans toute la force de l’âge, aux muscles puissants et rebondis : l’Hercule moderne, c’est un enfant accoudé sur un levier. » [1]

Mais tant de prodiges nouveaux n’ont-ils pas à s’effacer devant le plus surprenant, le plus troublant de tous : celui qui semble donner enfin à l’homme le pouvoir de créer, lui aussi, à son tour, en matérialisant le spectre impalpable qui s’évanouit aussitôt aperçu sans laisser une ombre au cristal du miroir, un frisson à l’eau du bassin ? L’homme ne put-il croire qu’il créait en effet lorsqu’il saisit, appréhenda, figea l’intangible, gardant la vision fugace, éclair, par lui gravés aujourd’hui sur l’airain le plus dur ?

En somme, Niepce et son fin compère furent sages d’avoir attendu pour naître. L’Église se montra toujours plus que froide aux novateurs, — quand elle ne leur fut pas un peu chaude, — et la découverte de 1842 avait des allures suspectes au premier chef. Ce mystère sentait en diable le sortilège et puait le fagot : la rôtissoire céleste avait flambé pour moins.

  1. Louis de Lucy