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Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/13

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balzac et le daguerréotype

Rien n’y manquait comme inquiétant : hydroscopie, envoûtement, évocations, apparitions. La nuit, chère aux thaumaturges, régnait seule dans es sombres profondeurs de la chambre noire, lieu d’élection tout indiqué pour le Prince des Ténèbres. Il ne fallait qu’un rien vraiment pour de nos filtres faire des philtres.

Il n’est donc pas à s’étonner si tout d’abord l’admiration elle-même sembla incertaine ; elle restait inquiète, comme effarée. Il fallut du temps pour que l’Animal Universel en prit son parti et s’approchât du Monstre.

Devant le Daguerréotype, ce fut « du petit au grand », comme prononce le dicton populaire, et l’ignorant où l’illettré n’eurent pas seuls cette hésitation défiante, comme superstitieuse. Plus d’un parmi les plus beaux esprits subit cette contagion du premier recul.

Pour n’en citer que dans les plus hauts, Balzac se sentit mal à l’aise devant le nouveau prodige : il ne se pouvait défendre d’une appréhension vague de l’opération Daguerrienne.

Il en avait trouvé son explication à lui, vaille que vaille à cette heure-là, rentrant quelque peu dans les hypothèses fantastiques à la Cardan. Je crois me bien rappeler avoir vu sa théorie particulière énoncée par lui tout au long dans un coin de l’immensité de son œuvre. Je n’ai pas loisir de l’y rechercher,