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Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/252

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natif du pays de l’Hippogriffe et de la Chimère ?

La photographie qui venait de naître offrait au moins à mon impuissance cette ressource de ne pas fatiguer trop longtemps la bonne volonté de mes modèles, en même temps qu’elle allait ouvrir devant moi des avenues jusque là insoupçonnées…

Un vieil ami, — bien qu’alors nous fussions jeunes, — Camille d’Arnaud, qui avait quitté la rédaction du journal d’Houssaye, l’Artiste, pour partager les recherches du savant praticien Bertsch, m’offrit de m’enseigner le métier.

En ces temps où les besognes, tant simplifiées aujourd’hui, nous étaient si compliquées et mal commodes, avec quelle patience affectueuse, jamais lassée, l’excellent homme s’appliqua-t-il à éduquer l’animal rétif que j’étais, inattentif, l’esprit à côté et l’œil aux corneilles, toujours insupportablement impatient de voir la fin avant le commencement !

Par combien de matinées cette volonté implacablement méthodique s’obstina-t-elle à me faire prendre — jusqu’à des trente fois de suite — entre mon pouce et mon index, selon le rite, la feuille de glace avant de me permettre d’y lancer d’un jet la nappe de collodion ; ainsi qu’il se faisait en ces âges héroïques !

Mais c’est ainsi, seulement, qu’on fait les bons