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LE MUR


Depuis que j’abrite ma vie
Derrière le mur de la loi,
Tous mes voisins meurent d’envie
De voir ce qui se fait chez moi.
Toute existence qui se cache
Pour le public a des appas.
Qu’on se le dise et qu’on le sache :
Ce mur est mien ; n’y touchez pas.

Je comprends qu’on veuille connaître
Les habitants d’une maison
Qui n’a ni porte ni fenêtre,
Et qui n’est pas une prison.
On se rassemble, on s’interpelle ;
Les plus hardis disent tout bas :
« Si nous appliquions une échelle ? » —
Ce mur est mien ; n’y grimpez pas.

Les polissons du voisinage
Profitent de notre sommeil
Pour y tracer plus d’une image
Que voit l’aurore à son réveil.