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les conquêtes du commandant belormeau

arrangées, mais comment ?… Par quel miracle ! Bien des gens, et j’en suis, auraient donné deux écus pour assister à la séance… Sans écus, nous allons le savoir.

Ce matin-là, Mlle  de Batanville, en robe de chambre et en caline de nuit, savourait ses rôties et son café à la crème, au coin d’un bon feu.

Sur ses genoux, son chat, Vicomte, descendant, lui aussi, d’une noble lignée, matou dodu et fourré, témoignait de sa satisfaction par un ronron assourdissant.

Benoîte allait et venait par la pièce, réparant le désordre matinal, tout en causant familièrement avec sa maîtresse. Les faits et gestes de Vicomte fournissaient la matière de ce premier entretien.

Ce chat était d’un caractère essentiellement fantasque. Tantôt il arrivait, ventre à terre, se jetait sur sa maîtresse, lui léchant les mains, l’assommant de coups de tête, lui prodiguant les marques d’une tendresse passionnée, généralement suivie des manifestations d’un appétit redoutable ; tantôt il était languissant et câlin, se laissait choir, sur le dos, avec des yeux mourants, des pattes recourbées en crochet et n’acceptait qu’un peu de lait avec un biscuit qu’il grignotait avec détachement ; ou bien, sans qu’on sût pourquoi, il se montrait d’une froideur déconcertante, montait l’escalier en s’arrêtant à chaque marche, se pourléchant avec obstination, sans daigner entendre les plus tendres appels ni paraître s’apercevoir des caresses. Ces matins-là, ordinairement, il n’avait pas faim.

L’humeur versatile de Vicomte tenait sa maîtresse en perpétuelle inquiétude et, suivant la loi illogique qui régit les cœurs humains, elle ne l’en aimait que mieux.

Donc, Mlle  Herminie, ayant achevé son café, reposait sur un guéridon, placé à ses côtés, sa tasse de faïence à fleurs d’or quand un coup de sonnette énergique ébranla la maison.