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a travers le grönland.

regagnèrent la terre ferme, après avoir passé sept jours sur l’inlandsis[1].

En 1871, l’inspecteur du Grönland septentrional, M. Krarup Smith, organisa une expédition pour explorer l’inlandsis, et en confia la direction à M. Möldrup. Les résultats de cette entreprise furent absolument nuis.

L’année suivante, Whymper revint au Grönland et parcourut les districts d’Umanak et de la partie nord de la baie de Disko. Cette fois il ne fit aucune tentative pour pénétrer dans l’intérieur du continent et se borna à gravir de hautes montagnes pour examiner l’inlandsis. Il revint persuadé qu’aucune « terre verte » n’existait derrière l’inlandsis et que le Grönland était entièrement couvert de glaciers.

La publication des travaux de Rink sur l’inlandsis du Grönland avait eu des résultats très importants. L’exploration des glaciers des Alpes, de la Scandinavie et du Grönland avait révélé l’importance des phénomènes glaciaires et permis de déduire de ces observations un tableau de la période quaternaire. On avait reconnu qu’à cette époque toute la Scandinavie et l’Europe septentrionale avaient été recouvertes d’une épaisse carapace cristalline et l’on en était venu à penser que les formes actuelles du terrain étaient le résultat des actions mécaniques de ces puissantes nappes de glace. Les vallées, les fjords, auraient été creusés par des courants de glace. Le géologue anglais Ramsay était le champion de celle théorie. N’était-ce pas précisément dans les régions soumises aux actions glaciaires quaternaires que se trouvaient les fjords et les vallées les plus profondes. Des géologues combattaient en même temps cette théorie ; les

  1. M. Nansen donne sur les résultats scientifiques de l’expédition de M. Nordenskiold de longs détails que nous croyons inutile de reproduire ici. La Deuxième Expédition suédoise au Grönland, traduite par Charles Rabot (Hachette et Cie, 1888), contient in extenso la relation du savant explorateur suédois. M. Nordenskiold avait signale à la surface de l’inlandsis la présence d’une poussière appelée par lui kryokonite qu’il croyait d’origine cosmique. Les naturalistes danois attribuent, au contraire, à ces dépôts une origine éolienne ; dans leur pensée, ils proviennent des montagnes riveraines de la côte et sont apportés par le vent sur le glacier. M. Nansen partage celle opinion. Dans la partie de l’inlandsis qu’il a parcourue, où les pointements rocheux sont rares, il n’a observé qu’une très petite quantité de kryokonite, et à une faible distance de la côte n’en a pas vu trace.