Page:Nansen - À travers le Grönland, trad Rabot, 1893.djvu/297

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journée, le froid variait entre -20° et -15°. Nulle part ailleurs, à cette époque de l’année, des températures aussi basses n’ont été observées. Quelle peut bien être l’intensité du froid en hiver dans cette région, c’est ce que nous ignorons encore.

De l’état de la neige nous pouvons au contraire conclure quelle peut être approximativement dans ce désert de glace la chaleur la plus élevée durant l’été.

Jusqu’à l’altitude de 1 980 mètres la vieille neige était complètement gelée et en partie transformée en grains de glace. Elle avait donc été exposée à une chaleur assez forte pour avoir subi une fusion partielle, après quoi une gelée était survenue. Cette couche était recouverte d’une nappe de neige fraîche très sèche, dont l’épaisseur variait de 15 à 30 centimètres.

Le 31 août au soir, à la hauteur de 2 770 mètres, nous rencontrâmes, à notre grand étonnement, par-dessous la couche superficielle de neige pulvérulente, une lamelle de verglas sur la vieille neige ; elle recouvrait une neige également pulvérulente, à travers laquelle nous enfoncions les bâtons à une grande profondeur sans jamais trouver de résistance. Évidemment ici, pendant l’été, le soleil ne peut déterminer qu’une très faible fusion sur une mince couche superficielle, et, dès qu’il disparaît, celle neige ramollie dans la journée se transforme en glace. À celle altitude, la fonte ne peut diminuer la quantité de neige entassée sur l’inlandsis ; l’eau de fusion, ne trouvant nulle part d’écoulement, se transforme la nuit en glace. Partout dans l’intérieur du Grönland, il ne fond en été qu’une très petite quantité de neige. Sur tous les points de l’inlandsis on remarquait une stratification très intéressante.

Le 3 septembre, voici la coupe relevée en plusieurs endroits : tout d’abord de la neige pulvérulente sur une épaisseur de 8 centimètres, au-dessous une couche de glace de 1 centimètre 1/2 à peine, puis une nouvelle strate de neige encore plus pulvérulente que la première, ayant une puissance de 18 centimètres ; après cela une seconde couche de glace, que le bâton ne pouvait traverser qu’avec difficulté. Le bâton enfonçait ensuite d’un pied ou deux à travers une neige de plus en plus dure ; à la profondeur de 62 centimètres il ne pouvait pénétrer davantage.