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la côte occidentale en vue.

raissent les raies blanches d’autres fentes orientées perpendiculairement à la direction que nous suivons. De ce côté, impossible d’avancer. Je fais signe aux autres de s’arrêter, et de suite nous installons le campement.

Dans l’ouest la terre est visible à la lueur mourante du crépuscule. Ce sont les montagnes que nous avons aperçues dans l’après-midi ; mais maintenant elles s’élèvent haut dans le ciel ; au sud on voit également un long lambeau de terre.


DESCENTE D’UN MONTICULE DE GLACE.
(DESSIN DE NANSEN, D’APRÈS UNE PHOTOGRAPHIE INSTANTANÉE.)

Par la tempête qui soufflait, il ne fut pas facile de dresser la tente. En outre partout la glace était polie et à vif, aussi fallut-il creuser des trous à la hache pour fixer les piquets. Pendant ce travail particulièrement pénible nous ressentions très vivement le froid. Aucun de nous n’avait envie d’allumer la lampe et d’attendre ensuite patiemment la cuisson de la soupe. Aussi à peine la tente est-elle dressée que nous nous blottissons tous dans nos sacs en mangeant notre dernier morceau de gruyère. Je m’aperçus alors que j’avais les doigts gelés. Il était trop tard pour rétablir la circulation en les frottant avec de la neige, et jusqu’au moment où je pus m’endormir, les douleurs furent intolérables.

En me réveillant le lendemain, ma montre était arrêtée, j’avais oublié de la remonter, et Sverdrup avait commis la même négligence. À partir de ce jour nos longitudes ne furent plus aussi