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Page:Nanteuil, L’épave mystérieuse, 1891.djvu/274

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L’ÉPAVE MYSTÉRIEUSE

Langelle rentra bientôt, annonçant que Mme de Résort remerciait de tout son cœur et acceptait la proposition de M. Le Toullec.

Alors, quittant la maison du Mourillon, tous se donnèrent rendez-vous pour l’heure du déjeuner chez Mme de Résort.

Arrivé le premier, Langelle tenta de réconforter la dernière, d’abord au sujet de son mari, ensuite quant au voyage projeté.

En effet, Mme de Résort s’accusait maintenant d’avoir trop vite et égoïstement accepté le dévouement de sa petite Marine.

« Enfin, ajouta Langelle, vous êtes la plus à plaindre et la plus sacrifiée, car vous restez seule livrée à vos inquiétudes et clouée sur ce lit.

— Et moi ! s’écria Paul d’un air offensé, les larmes aux yeux. C’est mal, monsieur de Langelle, de ne me compter pour rien ; pensez-vous donc que maman ne sera pas soignée et distraite, et puis… croyez-vous… que… je n’ai pas de chagrin… et sans ma sœur ?

— Mon chéri, lui dit Marine en l’attirant sur ses genoux, mon petit Paul bien-aimé, je sais à quel point nous pouvons compter sur toi. Ne pleure pas ainsi, tu vas agiter maman, » ajouta la jeune fille à demi-voix.

Mais le cœur de l’enfant était trop plein et il ne parvenait pas à arrêter ses sanglots. Très contrit, essayant de le calmer, Langelle aperçut Stop qui se coulait auprès du petit garçon.

Les chiens intelligents, vivant beaucoup avec l’homme, comprennent toujours les manifestations du chagrin, et, lorsqu’ils voient pleurer, ils savent témoigner leur sympathie aux affligés. Et Stop n’y manqua pas ; arrivé auprès du frère et de la sœur, il se mit à lécher doucement à plusieurs reprises la main du premier.

« Paul, s’écria Langelle, pendant que je serai là-bas, si toutefois madame votre mère y consent, voudriez-vous prendre soin de mon fils, que je songeais à laisser au commandant Le Toullec ou bien à Marius ? mais vous connaissez l’antipathie de Stop pour Mademoiselle ! »

Les larmes de Paul cessèrent subitement de couler, et, se précipitant vers le lit de sa mère :

« Vous le voulez bien ? Dites oui, mère chérie ; j’aime tant Stop, et depuis la mort de Frisette nous n’avons plus de chien. C’est très triste, maman, une maison sans chien.

Oui, mon cher petit, je consens, remercie M. de Langelle, et promets-lui de bien soigner Stop. Ah ! voici notre ami. »

En effet, Charlot venait d’ouvrir la porte en annonçant :

« Le commandant Le Toullec, » et tout de suite il ajouta : « Madame est servie. »