Page:Nau - Force ennemie.djvu/35

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tent presque réellement à la déroute d’ennemis imaginaires ou à la capture d’un vaisseau de pure fantaisie. Et il y avait un malheureux texte latin absolument indispensable à ma « prédication », — un texte dont je ne pouvais jamais retrouver que les deux premiers mots : Et nuncet nuncet nunc !… L’infructueuse recherche des autres vocables disparus de ma mémoire me causait une irritation des plus cocasses. Je ne me guéris de ma funèbre manie que le jour où mons Bid’homme, remis sur pied et plus courtois que jamais, me gratifia, lors d’une rencontre matinale, des agréables mais mystérieuses épithètes de : « grand dardaillon » et de « margouillard ». À propos, il faut que je vous fasse voir une caricature de ce Bid’homme, un dessin assez médiocre mais divertissant qui est mon œuvre. Je vais vous chercher ce « crayon ».

Le Dr  Magne sort après avoir adressé à ses compagnons, à moi, aux murs, — surtout aux murs, — un superbe salut circulaire. Aussitôt l’un de ses amis se lève et vient occuper sa chaise. C’est un homme d’une cinquantaine d’années, glabre, un peu grisonnant ; sa figure d’une pâleur luisante semble poncée. Il a deux poches sous les yeux, — de gros yeux bombés que recouvrent à demi leurs paupières en forme de coquilles de clovisses. Son nez est formidable, d’une courbe si ample et si hardie que je ne puis le comparer qu’à certains promontoires. Il tient continuellement à la