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Page:Nau - Hiers bleus, 1904.djvu/10

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HIERS BLEUS

Tout près la côte noire et grasse au charme hostile
Carre ses cultures d’un vert épais,
Ses prés, ses bois trapus aux rameaux fous coupés
Et les damiers pesants de sa grisâtre ville
Belle d’art contenu, — de pondération !…
D’où montent, — au mépris des plans géométriques
Raides et vertueux jusqu’à l’obsession, —
Dès que le soir bleuit les palazzi de briques,
Des râles furieux de bestialité.

Dans la chaude diaphaneïté,
La lande claire aux ajoncs barbares
Où pleuvent des gouttes de soleil
Enserre les massifs lustrés et les fleurs rares
Qui tressaillent, pâlissant à l’éveil
Des rudes souffles salins du large.

Mais partout, — des calmes parterres odorants,
Des gazons, des sentiers micacés, de leurs marges
De verveine âcrement exquise et d’iris blancs,
Jaillit aux brises en flammes rosées,
En flammes de fraîcheur et de suavité
Qu’attisent les brillants frissonnants des rosées,
La vivace et la charmeuse gracilité
Des enivrantes, des adorables jacinthes :

Jacinthes, âmes des printemps naissants,
Des printemps défunts aux gaîtés éteintes,
Votre haleine redit nos extases d’enfants