Page:Naudet - Notice historique sur MM. Burnouf, père et fils.djvu/27

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hors de leur voie, l’un par une révolution, l’autre par une invasion ennemie, et forcés de sacrifier, pendant de longues années, leur passion littéraire aux besoins de la vie, celui-ci dans le magasin d’un marchand, celui-là dans une intendance de domaine rural ; tous deux enfin tirés soudainement de leur exil sur la recommandation de leurs premiers succès, dont quelqu’un s’était souvenu pour eux, et méritant leur fortune pour n’avoir jamais désespéré d’eux-mêmes.

M. Burnouf eut le bonheur d’assister et de pouvoir aider pour sa part, plus importante que notoire alors, à la renaissance de l’Université, non plus limitée au ressort de Paris, mais embrassant désormais l’empire français tout entier.

C’était une époque de réédification sociale ; une main puissante, tandis qu’elle consacrait par les lois les conquêtes de la révolution dans l’ordre civil, venait réparer les ruines que cette révolution avait faites en confondant, en renversant, avec les tours féodales et les bastilles, les colonnes de l’État.

La démocratie s’est toujours pressée d’exiger l’instruction pour tous, mais d’en faire déchoir en même temps le niveau, parce qu’elle prend en haine les parties élevées de la science, où ne peut atteindre que le petit nombre, et en dédaigne les spéculations pures, n’estimant que ses applications pratiques et son utilité matérielle ; instinct d’orgueil envieux, et de sensualité grossière, qui tend à l’abaissement des nations par les recherches du bien-être, par l’ostracisme des intelligences privilégiées, lesquelles font seules la grandeur des peuples dans l’histoire et leur supériorité dans le monde.

L’empereur Napoléon voulut créer ce qui avait man-