Page:Nemo - L’Amitié, 1884.djvu/57

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Pour un parent choisi par le cœur, les exigences du monde ne l’autorisent pas.

Il faut, le deuil au fond de l’âme, porter du rose et, le cœur bouleversé, rire, du moins avoir la surface calme.

Mais cette union intime et douce ne cesse pas, ne cesse jamais. À nul tyran, il n’est loisible de la rompre. Le terme de l’amitié est de n’en pas avoir.

Non, rien ne saurait briser, anéantir un lien tout spirituel.

Ce qui refroidit les amitiés mondaines redouble au contraire les amitiés saintes.

L’éloignement est à la bonne, vraie, parfaite amitié, ce qu’est à un grand feu un grand vent : il l’allume encore plus.

La pensée que, sur un point du globe, on a, dans un cœur, une place, quelle que soit la distance, l’éternise. Le souvenir, bien qu’il en fasse regretter la réalité, ne revient point sans un sentiment de bonheur.

Qu’on apprécie alors tout ce qui rappelle un digne ami ! Que les moindres choses sont chères ! Qu’une esquisse de ses traits, quelle qu’en soit l’imperfection, qu’un rien, de nulle valeur pour d’autres, sont d’un inestimable prix !

On les regarde cent fois ; cent fois, on les quitte, pour y revenir encore.