Page:Nerciat - Félicia.djvu/191

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fît quelque forte agacerie. Elle s’était mise sur le pied de le caresser de la manière la plus libre et de ne se gêner avec lui, non plus que s’il eût été du même sexe. Le piège favori était de le faire appeler le matin, pour lire à son chevet. Alors c’était un bras, un téton qu’on laissait voir : puis, l’on avait chaud, l’on se découvrait, ou bien il s’agissait de quelque puce incommode ; on employait l’officieux Monrose à lui donner la chasse. C’était ici, c’était là, et l’insecte rusé ne se trouvait jamais, surtout s’il avait le bonheur de se retrancher dans quelques postes favorables pour lesquels le timide chasseur avait du respect.

Un jour, et j’en ris encore, un de ces petits animaux devait avoir fait rage : Sylvina en avait perdu tout le fruit de sa lecture. Après s’être fait longtemps poursuivre, la maligne bête s’était fourrée… où vous savez… et le pauvre petit avait la simplicité de croire à ce lieu commun ! — Mais cela n’est-il pas singulier ? Monrose ?… là… précisément là ! — Puis on y conduisit la jolie main du lecteur, dont on choisit le plus grand doigt pour livrer à la puce une guerre cruelle. Ce doigt, guidé sur un point très sensible, fut mis en train et mérita bientôt d’être applaudi de sa dextérité. — À merveille, disait Sylvine, en se pâmant…, je sens, je sens que tu la tues… encore… encore un peu… que la maudite bête ne revienne jamais.

J’étais tout uniment témoin auriculaire de cette excellente scène. Me méfiant des lectures, et voulant savoir où en était Monrose, s’il me trompait ou non, je m’étais glissée par le cabinet de toilette, dans ce petit dégagement aveugle qu’il est maintenant à la mode de pratiquer autour de presque tous les lits recherchés ; invention qu’on ne peut assez louer pour tout ce qu’elle peut favoriser d’agréable et prévenir de dangereux. Là, je ne perdis pas la moindre circonstance de cette fameuse chasse. Je ne quittai la place que pour aller éclater de rire quelque part ; après quoi, craignant que les choses n’allassent plus loin, vu la commodité de l’occasion, je pris sur moi d’entrer et de faire grand jour ; ce qui ne laissa pas de donner beaucoup d’humeur à Syl-