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Page:Nerciat - Le Diable au corps, 1803.djvu/239

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LE DIABLE AU CORPS.

HECTOR.

Un peu, Madame. Je chante, et joue passablement du violon.

LA MARQUISE.

Des talens avec tant d’autres perfections ! mais tu es un être admirable !

(Un baiser.)
HECTOR.

Ces détails, Madame, ne sont point pour me vanter, mais pour vous faire comprendre que, si mes bienfaiteurs eussent vécu, sans doute ils m’eussent destiné à quelque profession moins ignoble que celle que la nécessité me forçait d’embrasser après leur mort. L’époux était une espece d’homme de lettres, ce qui me mettait dans le cas de m’instruire, et de lire sur-tout beaucoup d’ouvrages d’imagination : c’était le goût du personnage. L’épouse disait quelquefois que le théatre serait bien mon lot : elle aimait le spectacle à la fureur, et même plus d’un suppôt de Thalie était reçu parfois assez, secrétement au logis ; mais l’époux, qui jadis avait écrit pour la scene, et joué de malheur, à ce que je crois, faisait profession d’abhorrer jusqu’au nom d’acteur. — Cette digression, Madame, n’est pas inutile, puisqu’il s’agit de vous faire comprendre comment je ne pouvais avoir une seule idée juste, relativement à quelque état futur, quand le sort voulut que je me trouvasse tout-à-coup isolé, sans ressources, réduit en un mot à me faire du peigne un ignoble pis aller, après