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Page:Nerciat - Le Diable au corps, 1803.djvu/504

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LE DIABLE AU CORPS.


projettait de venger cruellement sa maîtresse déshonorée, et son propre nez écorché. — Au nom du plaisir, arrête, s’écrie-t-elle, et sachons plutôt si notre adorable maîtresse peut encore respirer… — La pincette, alors, tombe des mains du vengeur attendri… — Ô bonheur ! elle est pleine de vie ! — Mets la main sur son cœur. — Comme il bat ! — Dieux ! elle est peut-être sauvée ! — Nouveau motif de consolation. Elle soupire : mais avec tant de sérénité ! sur un ton si doux ! Nos experts n’y sont point trompés. Ils comprennent à merveilles qu’un tel soupir ne peut être que l’accens d’une sensation de plaisir incompatible avec les angoisses de la mort. Déja l’audacieux Hilarion est, dans leur cœur, à moitié justifié : mais, pour la forme, jouant bien la fureur et vibrant la redoutable pincette, Belamour croit devoir l’apostropher ainsi : — Rends graces, malheureux, au faible espoir dont nous pouvons commencer à nous flatter ; le retour de sa précieuse vie sauve la tienne : sans ce miracle… ta mort… — Hilarion, la pincette à deux doigts de son pauvre chef, glacé de frayeur, toujours Capucin bien digne de son état, se prosterne, baise les souliers du terrible Belamour, et balbutie une histoire, si vraie dans tous ses points, qu’elle l’expose derechef au danger d’être assommé. Cependant, on lui fait grace, à condition qu’il gardera le plus inviolable secret. (Ne le