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Page:Nerciat - Monrose, 1871.djvu/357

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MONROSE


de respect en général pour les importants et les prétentieux, je fus, de ce moment, aussi avare d’attentions avec le petit ministre, que j’en étais libéral avec tout ce qui m’entourait. Gênant à dessein pour lui seul, je m’arrangeai si bien qu’il lui fut impossible d’approcher des dames que j’avais amenées. Il n’y tint pas ; au moment du ballet, après s’être plaint que la loge fût trop pleine, qu’on y étouffait, ce que je me gardai bien d’avoir l’air d’entendre, l’Excellence sortit et fut étaler au balcon, en face de nous, la plaque brillante[1] qui décorait son modeste habit du jour.

« Cependant Mimi venait d’embaumer le sang de son mouton (c’est ainsi qu’elle nommait le cher petit mari). Celui-ci, déjà bouffi de se croire à moitié fermier général, ne savait comment remercier assez une femme si essentielle. Ne convenait-il pas de marquer par quelque fête l’époque de ce fortuné voyage, et de mettre le comble à la douceur d’un aussi beau jour ! Voici

  1. Il y a des ordres fort subalternes dont la décoration fait plus de fracas que celle du Saint-Esprit. La Toison d’or n’a point de plaque. On connaît la plaisanterie de ce colonel qui, sachant qu’on pouvait traiter de certain ordre très-parant, l’acquit pour son tambour-major. Pourtant il n’y avait point encore alors de démocrates, mais il y eut de tout temps en France d’impertinents railleurs.