Page:Nerval - Élégies nationales et Satires politiques, 1827.djvu/78

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Nous voyons, sans retour, nos jours se consumer,
Sans que le flambeau mort puisse se rallumer ;
Tout meurt, et le pouvoir, et le talent lui même,
Ainsi que le vulgaire, a son heure suprême.

Une idée a pourtant caressé mon orgueil,
Je voudrais qu’un grand nom décore mon cercueil ;
Tout ce qui naît s’éteint, il est vrai, mais la gloire
Ne meurt pas tout entière, et vit dans la mémoire ;
Elle brave le temps, aux siècles révolus
Fait entendre les noms de ceux qui ne sont plus ;
Et, quand un noble son dans les airs s’évapore,
Elle est l’écho lointain qui le redit encore.

Il me semble qu’il est un sort bien glorieux :
C’est de ne point agir comme ont fait nos aïeux,
De ne point imiter, dans la commune ornière,
Des serviles humains la marche moutonnière.
Un cœur indépendant, d’un feu pur embrasé,
Rejette le lien qui lui fut imposé,
Va, de l’humanité lavant l’ignominie,
Arracher dans le ciel ces dons qu’il lui dénie,
S’élance, étincelant, de son obscurité,
Et s’enfante lui même à l’immortalité.