Page:Nerval - Élégies nationales et Satires politiques, 1827.djvu/77

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Qu’on parle de grandeur et d’immortalité…
Mortels, pourquoi ces bruits de votre vanité ?
Qu’est-ce ? Un roi qui s’éteint, un empire qui tombe ?
Un poids plus ou moins lourd qu’on jette dans la tombe….
À de tels accidens, dont l’homme s’est troublé,
Le ciel s’est-il ému ? le sol a-t-il tremblé ?…
Non, le ciel est le même, et dans sa paix profonde
N’a d’aucun phénomène épouvanté le monde :
Eh ! qu’importe au destin de la terre et des cieux
Que le sort ait détruit un peuple ambitieux,
Ou bien qu’un peu de chair d’un puissant qu’on révère
Ait d’un nouvel engrais fertilisé la terre !

Et vous croyez, mortels, que Dieu, par ses décrets,
Règle du haut des cieux vos petits intérêts,
Et choisissant en vous des vengeurs, des victimes,
Prend part à vos vertus aussi bien qu’à vos crimes,
Vous montre tour à tour ses bontés, son courroux,
Vous immole lui-même, ou s’immole pour vous ?….
Ô vanité de l’homme, aveuglement stupide,
D’un atome perdu dans les déserts du vide,
Qui porte jusqu’aux cieux sa faible vanité,
Et veut d’un peu plus d’air gonfler sa nullité !

Hélas ! dans l’univers, tout passe, tout retombe
Du matin de la vie à la nuit de la tombe !