LA FOLIE EST GENERALE.
J’AI pris cent et cent fois la lanterne en la main,
Cherchant en plein midi, parmi le genre humain^
Un homme qui fust homme et defaiot et de mine,
Et qui pust’des vertus passer parl’estamine.,
Il n’est coin et recoin que je n’ayè tenté,
Depuis que la nature ici-bas m’a planté ;
Mais tant plus jo me lime, et plus je me rabote,
Je crois qu’à mon advis tout le monde radote,
Qu’il a la teste vuide et sans dessus dessous,
Ou qu’il faut qu’au rebours je sois l’un des plus fous ;
C’est de nostre folie un plaisant stratagesme, -
Se flattant, de juger les autres par soi-mesme.
Ceux qui, pour.voyager, s’embarquent dessus l’eau
Voyent aller la terre, et non pas leur vaiseau.
Peut-estre, ainsi trompé, que faussement je Juge.
Toutesfois si les fous ont leur sens pour refuge,
Je ne suis pas tenu de croire aux yeux d’aulruy :
Puis j’en sçay pour le moins autant ou plus que lui.
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