Page:Nerval - Contes et Facéties, 1852.djvu/28

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pré aux Clercs, rayé de ses belles allées de tilleuls, encadré de ses saules gris ébouriffés et de ses saules verts pleurant dans l’eau ; puis, sur chaque bord, la tour de Nesle et la tour du Bois, qui semblaient faire sentinelle aux portes de Paris comme les géants des romans anciens.

Tout à coup un grand bruit de pétards fit tourner vers un point unique les yeux des promeneurs et des observateurs, et annonça un spectacle digne de fixer l’attention. C’était au centre d’une de ces petites plates-formes en demi-lune, surmontées naguère encore de boutiques en pierre, et qui formaient alors des espaces vides au-dessus de chaque pile du pont, et en dehors de la chaussée. Un escamoteur s’y était établi ; il avait dressé une table, et sur cette table se promenait un fort beau singe, en costume complet de diable, noir et rouge, avec la queue naturelle, et qui, sans la moindre timidité, tirait force pétards et soleils d’artifice, au grand dommage de toutes les barbes et les fraises qui n’avaient pas élargi le cercle assez vite.

Pour son maître, c’était une de ces figures du type bohémien, commun cent ans avant,