Aller au contenu

Page:Nerval - Contes et Facéties, 1852.djvu/47

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais ce qui, dans les façons du militaire, choquait le plus le bon Eustache, c’était une tendance perpétuelle à le traiter en petit garçon, à mettre en lumière les côtés peu favorables de sa physionomie, et enfin à lui donner en toute occasion vis-à-vis de Javotte une couleur ridicule, fort désavantageuse dans ces premiers jours où un nouveau marié a besoin de s’établir sur un pied respectable, et de prendre position pour l’avenir ; ajoutez aussi qu’il fallait peu de chose pour froisser l’amour-propre tout neuf et tout raide encore d’un homme établi en boutique, patenté et assermenté.

Une dernière tribulation ne tarda pas à combler la mesure. Comme Eustache allait faire partie du guet des métiers, et qu’il ne voulait pas, comme l’honnête maître Goubard, faire son service en habit bourgeois et avec une hallebarde prêtée par le quartenier, il avait acheté une épée à coquille qui n’avait plus de coquille, une salade et un haubergeon en cuivre rouge que menaçait déjà le marteau d’un chaudronnier, et, ayant passé trois jours à les nettoyer et à les fourbir, il parvint à leur donner un certain lustre qu’ils n’avaient pas