Page:Nerval - Contes et Facéties, 1852.djvu/63

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tait pas sans émotion, mais pourtant il avait foi dans le charme du bohémien ; car on sait que jamais les opérations magiques, charmes, philtres et envoultements n’eurent plus de crédit qu’à cette époque, où ils donnèrent lieu à tant de procès dont les registres des parlements sont remplis, et dans lesquels les juges eux-mêmes partageaient la crédulité générale.

Le témoin d’Eustache, qu’il avait pris sur le Pont-Neuf et payé un écu, salua l’ami de l’arquebusier, et lui demanda s’il était dans l’intention de se battre aussi ; l’autre lui ayant fait réponse que non, il se croisa les bras avec indifférence, et se recula pour voir faire les champions.

Le drapier ne put se garder d’un certain mal de cœur quand son adversaire lui fit le salut d’armes, qu’il ne rendit point. Il demeurait immobile, tenant son épée devant lui comme un cierge, et si mal planté sur ses jambes, que le militaire, qui au fond n’avait pas le cœur mauvais, se promit bien de ne lui faire qu’une égratignure. Mais à peine les rapières se furent-elles touchées, qu’Eustache s’aperçut que sa main entraînait son bras en avant, et se