Page:Nerval - La Mort de Talma, 1826.djvu/4

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Nous ne l’entendrons plus ! — Cet organe sublime
Qui fit si bien parler le courage et le crime,
Et pénétra nos cœurs de sentiments si beaux,
S’est éteint pour jamais dans la nuit des tombeaux !
Nous ne le verrons plus ! — C’est en vain qu’au théâtre,
Qu’il remplit si souvent d’une foule idolâtre,
Nous chercherons ce port rempli de majesté,
Cette toge où vivait un air d’antiquité,
Cet œil étincelant d’une si noble flamme,
Ces traits pleins d’énergie où s’imprimait son ame,
Cet organe brûlant, tant de fois entendu,
Qui traînait après soi notre esprit suspendu.....
Plus de Talma ! — La scène, à tous les yeux déserte,
D’inutiles acteurs en vain sera couverte ;
En vain d’attraits nouveaux on voudra l’embellir,
Un vide y restera qui ne peut se remplir.

Écoutez ! Écoutez ! Je crois entendre encore
Les sublimes accents de cette voix sonore :
Ici, Brutus aux yeux du public transporté
Parle de la patrie et de la liberté ;
Germanicus trahi périt avec courage,
Et Regulus s’écrie : À Carthage ! À Carthage !
Marius et Sylla rappellent par leurs traits
Ceux d’un héros plus grand, cher encore aux Français ;
Marius indigné contre Rome conspire,
Et César perd la vie en acceptant l’empire.

D’Otello, d’Orosmane, objets de nos terreurs,
Qu’il représente bien les jalouses fureurs !
          Que de rage dans leur sourire !
Au fils d’Agamemnon qu’il prête en son délire
          Une étonnante vérité !
          Rien de lui-même en lui ne reste,