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LES FILLES DU FEU

Ces jeunes filles fallacieuses nous firent faire une route bien étrange ; — il faut ajouter qu’il pleuvait.


La route était fort dégradée, avec des ornières pleines d’eau, qu’il fallait éviter en marchant sur les gazons. D’énormes chardons, qui nous venaient à la poitrine, — chardons à demi gelés, mais encore vivaces, — nous arrêtaient quelquefois.

Ayant fait une lieue, nous comprîmes que ne voyant ni Ver ni Ève, ni Othis, ni seulement la plaine, nous pouvions nous être fourvoyés.

Une éclaircie se manifesta tout à coup à notre droite, — quelqu’une de ces coupes sombres qui éclaircissent singulièrement les forêts…

Nous aperçûmes une hutte fortement construite en branches rechampies de terre, avec un toit de chaume tout à fait primitif. Un bûcheron fumait sa pipe devant la porte.

— Pour aller à Ver ?…

— Vous en êtes bien loin… En suivant la route, vous arriverez à Montaby.

— Nous demandons Ver, — ou ève…

— Eh bien ! vous allez retourner… vous ferez une demi-lieue (on peut traduire cela si l’on veut en mètres, à cause de la loi), puis, arrivés à la place où l’on tire l’arc, vous prendrez à droite. Vous sortirez du bois, vous trouverez la plaine, et ensuite tout le monde vous indiquera Ver.

Nous avons retrouvé la place du tir, avec sa tribune et son hémicycle destiné aux sept vieillards. Puis nous nous sommes engagés dans un sentier qui doit être fort beau quand les arbres sont verts. Nous chantions encore, pour