Page:Nerval - Les Filles du feu.djvu/123

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
95
ANGÉLIQUE

la plus belle partie de la contrée ; les eaux miroitent à travers les grands arbres roux, les pins et les chênes verts. Les grès du désert prennent à gauche un aspect druidique. La tombe de Rousseau se dessine à droite, et plus loin, sur le bord, le temple de marbre d’une déesse absente, — qui doit être la Vérité.

Ce dut être un beau jour que celui où une députation, envoyée par l’Assemblée nationale, vint chercher les cendres du philosophe pour les transporter au Panthéon. — Lorsqu’on parcourt le village, on est étonné de la fraîcheur et de la grâce des petites filles, — avec leurs grands chapeaux de paille, elles ont l’air de Suissesses… Les idées sur l’éducation de l’auteur d’Émile semblent avoir été suivies ; les exercices de force et d’adresse, la danse, les travaux de précision encouragés par des fondations diverses, ont donné sans doute à cette jeunesse la santé, la vigueur et l’intelligence des choses utiles.


J’aime beaucoup cette chaussée, — dont j’avais conservé un souvenir d’enfance, — et qui, passant devant le château, rejoint les deux parties du village, ayant quatre tours basses à ses deux extrémités.

Sylvain me dit : — Nous avons vu la tombe de Rousseau : il faudrait maintenant gagner Dammartin, où nous trouverons des voitures pour nous mener à Soissons, et de là, à Longueval. Nous allons nous informer du chemin aux laveuses qui travaillent devant le château.

— Allez tout droit par la route à gauche, nous dirent-elles, ou, également, par la droite… Vous arriverez, soit à Ver, soit à Ève, — vous passerez par Othis, et en deux heures de marche vous gagnerez Dammartin.