Page:Nerval - Les Filles du feu.djvu/187

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«Ah ! dites, ma mère, ma mie, — Ce que j’entends pleurer ici ? — Ma fille, ce sont les enfants — Qui se plaignent du mal de dents. »

« Ah ! dites, ma mère, ma mie, — Ce que j’entends clouer ici ? — Ma fille, c’est le charpentier, — Qui raccommode le plancher ! »

« Ah ! dites, ma mère, ma mie, — Ce que j’entends chanter ici ? — Ma fille, c’est la procession — Qui fait le tour de la maison ! »

« Mais dites, ma mère, ma mie, — Pourquoi donc pleurez-vous ainsi ? — Hélas ! je ne puis le cacher ; — C’est Jean Renaud qui est décédé. »

« Ma mère ! dites au fossoyeux — Qu’il fasse la fosse pour deux, — Et que l’espace y soit si grand, — Qu’on y renferme aussi l’enfant ! »

Ceci ne le cède en rien aux plus touchantes ballades allemandes, il n’y manque qu’une certaine exécution de détail qui manquait aussi à la légende primitive de Léonore et à celle du roi des Aulnes, avant Goëthe et Burger. Mais quel parti encore un poète eût tiré de la complainte de Saint-Nicolas, que nous allons citer en partie.

Il était trois petits enfants — Qui s’en allaient glaner aux champs.

S’en vont au soir chez un boucher. — « Boucher, voudrais-tu nous loger ? — Entrez, entrez, petits enfants, — Il y a de la place assurément. »

Ils n’étaient pas sitôt entrés, — Que le boucher les a tués, — Les a coupés en petits morceaux, — Mis au saloir comme pourceaux.

Saint Nicolas au bout d’sept ans, — Saint Nicolas vint dans ce champ. — Il s’en alla chez le boucher : — « Boucher, voudrais-tu me loger ? »

« Entrez, entrez, saint Nicolas, — Il y a d’la place, il n’en manque pas. » — Il n’était pas sitôt entré, — Qu’il a demandé à souper.