Page:Nerval - Les Filles du feu.djvu/191

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y a, par exemple, la fille d’un pâtissier, que son père envoie porter des gâteaux chez un galant châtelain. Celui-ci la retient jusqu’à la nuit close, et ne veut plus la laisser partir. Pressée de son déshonneur, elle feint de céder, et demande au comte son poignard pour couper une agrafe de son corset. Elle se perce le cœur, et les pâtissiers instituent une fête pour cette martyre boutiquière.

Il y a des chansons de causes célèbres qui offrent un intérêt moins romanesque, mais souvent plein de terreur et d’énergie. Imaginez un homme qui revient de la chasse et qui répond à un autre qui l’interroge :

«J’ai tant tué de petits lapins blancs — Que mes souliers sont pleins de sang. — T’en as menti, faux traître ! — Je te ferai connaître. — Je vois, je vois à tes pâles couleurs — Que tu viens de tuer ma sœur !»

Quelle poésie sombre en ces lignes qui sont à peine des vers ! Dans une autre, un déserteur rencontre la maréchaussée, cette terrible Némésis au chapeau bordé d’argent.

On lui a demandé — « Où est votre congé ? — Le congé, que j’ai pris, il est sous mes souliers.»

Il y a toujours une amante éplorée mêlée à ces tristes récits.

La belle s’en va trouver son capitaine. — Son colonel et aussi son sergent...

Le refrain est une mauvaise phrase latine, sur un ton de