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LES FILLES DU FEU

Pileur. » Tout un drame effrayant se déroula sous mes yeux.

Ce n’est pas un roman.


UN DRAME DOMESTIQUE. — AFFAIRE LE PILEUR.


L’action représente une de ces terribles scènes de famille qui se passent au chevet des morts, — dans ce moment, si bien rendu jadis sur une scène des boulevards, — où l’héritier, quittant son masque de componction et de tristesse, se lève fièrement et dit aux gens de la maison : « Les clefs ? »

Ici nous avons deux héritiers après la mort de Binet de Villiers : son frère Binet de Basse-Maison, légataire universel, et son beau-frère Le Pileur.

Deux procureurs, celui du défunt et celui de Le Pileur travaillaient à l’inventaire, assistés d’un notaire et d’un clerc. Le Pileur se plaignit de ce qu’on n’avait pas inventorié un certain nombre de papiers que Binet de Basse-Maison déclarait de peu d’importance. Ce dernier dit à Le Pileur qu’il ne devait pas soulever de mauvais incidents et pouvait s’en rapporter à ce que dirait Châtelain, son procureur.

Mais Le Pileur répondit qu’il n’avait que faire de consulter son procureur ; qu’il savait ce qui était à faire, et que s’il formait de mauvais incidents, il était assez gros seigneur pour les soutenir.

Basse-Maison, irrité de ce discours, s’approcha de Le Pileur et lui dit, en le prenant par les deux boutonnières du haut de son justaucorps, qu’il l’en empêcherait bien ; — Le Pileur mit l’épée à la main, Basse-Maison en fit au-