Page:Nerval - Les Illuminés, 1852.djvu/135

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ragement à vous instruire, un attrait qui préserve vos mœurs. Nous en reparlerons, mon ami. »

La digne femme se leva, et fit un geste d’adieu. Nicolas se précipita sur ses mains qu’il baigna de larmes. « Ah ! madame, » s’écria-t-il d’une voix entrecoupée, mais Mme  Parangon ne voulut pas en entendre davantage. Elle le laissa tout entier à ses réflexions et à son admiration pour tant de grâce et de bonté. Il était clair maintenant pour lui qu’elle savait tout, et qu’elle avait adorablement tout compris et tout réparé.

VIII.
la surprise.

On va voir maintenant se presser les événements. Nicolas n’est plus ce jeune homme naïf et simple, amant des solitudes et des muses latines, d’abord un petit paysan rude et sauvage, puis un studieux élève des jansénistes, puis encore un amoureux idéal et platonique, à qui une femme apparaît comme une fée, qu’il n’ose même toucher de peur de faire évanouir son rêve. L’air de la ville a été mortel pour cette âme indécise, énergique seulement dans son amour de la nature et du plaisir. Grâce aux conseils perfides qu’il s’est plu à entendre, grâce à ces livres d’une philosophie suspecte, où la morale a les attraits du vice et le masque de la sagesse[1], le voilà maintenant

  1. Il écrivait plus tard : « Sans mon amour du travail, je serais devenu un scélérat. »