Page:Nerval - Les Illuminés, 1852.djvu/227

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çants qui réduit à rien le capital : — c’est la banque d’échange dans toute sa pureté. — Voici un exemple. Vingt commerçants, ouvriers eux mêmes, habitent une rue du quartier Saint-Martin. Chacun d’eux est le représentant d’une industrie utile. L’argent manque par suite des inquiétudes politiques, et cette rue, autrefois si prospère, est attristée de l’oisiveté forcée de ses habitants. Un bijoutier-orfèvre qui a voyagé en Allemagne, qui y a vu les hernutes, conçoit l’idée d’une association analogue des habitants de la rue : — on s’engagera à ne se servir d’aucune monnaie et à tout acheter ou vendre par échange, de sorte que le boulanger prenne sa viande chez le boucher, s’habille chez le tailleur et se chausse chez le cordonnier ; tous les associés doivent agir de même. Chacun peut acquérir ou dépenser plus ou moins, mais les successions retournent à la masse, et les enfants naissent avec une part égale dans les biens de la société ; ils sont élevés à frais communs, dans la profession de leur père, mais avec la faculté d’en choisir une autre en cas d’aptitude différente ; ils recevront du reste une éducation semblable. Les associés se regarderont comme égaux, quoique quelques-uns puissent être de professions libérales, parce que l’éducation les mettra au même niveau. Les mariages auront lieu de préférence entre des personnes de l’association, à moins de cas extraordinaires. Les procès seront soutenus pour le compte de tous ; les acquisitions profiteront à la masse, et l’argent qui reviendra à la société par suite de ventes faites en dehors d’elle sera consacré à acheter les matières premières en raison de ce qui sera nécessaire pour chaque état. — Tel est ce plan, que l’auteur n’avait pas du reste l’idée d’appliquer à la société entière, car il donne à choisir entre différentes formes d’association, laissant à l’expérience les conditions de