Page:Nerval - Les Illuminés, 1852.djvu/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le dauphin fut enlevé à ses parents, et Scévole Cazotte parvint à le reprendre et le rapporta à la reine, qui le remercia en pleurant. La lettre suivante, qu’il écrivit à son père, est postérieure à cet événement :

« Mon cher papa, le 14 juillet est passé, le roi est rentré chez lui sain et sauf. Je me suis acquitté de mon mieux de la mission dont vous m’aviez chargé. Vous saurez peut-être si elle a eu tout l’effet que vous en attendiez. Vendredi, je me suis approché de la sainte table ; et, en sortant de l’église, je me suis rendu à l’autel de la patrie, où j’ai fait, vers les quatre côtés, les commandements nécessaires pour mettre le Champ-de-Mars entier sous la protection des anges du Seigneur.

» J’ai gagné la voiture, contre laquelle j’étais appuyé quand le roi est remonté ; Mme Elisabeth m’a même alors jeté un coup d’œil qui a reporté toutes mes pensées vers le ciel ; sous la protection d’un de mes camarades, j’ai accompagné la voiture en dedans de la ligne ; et le roi m’a appelé et m’a dit : Cazotte, c’est vous que j’ai trouvé à Epernay, et à qui j’ai parlé ? et je lui ai répondu : Oui, sire ; à la descente de la voiture j’y étais… Et je me suis retiré quand je les ai vus dans leurs appartements.

» Le Champ de Mars était couvert d’hommes. Si j’étais digne que mes commandements et mes prières fussent exécutés, il y aurait furieusement de pervers de liés. Au retour tous criaient Vive le roi ! sur le passage. Les gardes nationaux s’en donnaient de tout leur cœur, et la marche était un triomphe. Le jour a été beau, et le commandeur a dit que, pour le dernier jour que Dieu laissait au diable, il le lui avait laissé couleur de rose. Adieu, joignez vos prières pour donner de l’efficacité aux miennes. Ne lâchons pas prise. J’embrasse maman Zabeth (Elisabeth). Mon respect à Mme la marquise. (La marquise de Croix.) »